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Nos ados et le covid

Jan 24, 2021

Nos ados et le covid

Je suis en télé-consultation avec Aurélie et ses parents.

Ses parents ont souhaité cet entretien. Ils trouvent leur fille tristoune et démotivée.

Aurélie a 15 ans. Elle est en seconde.

Le monde ? Elle le trouve plutôt chouette. Des projets pleins la tête et surtout l’envie de passer du temps, un an ou plus, au Japon.

Les amis ? Super. Même si c’est différent avec le covid. On se parle tout le temps, à distance. Mais on se dit tout.

L’école ? Bof. Aucun sens. Vivement qu’on soit reconfinné.

La vie ? On n’est guère qu’un atome dans l’univers, autant dire pas grand-chose.

Une lucidité à tout crin

Déprimée, Aurélie ? Je ne crois pas. Lucide, voire hyperlucide, oui, cent fois oui.

Quel sens donner au lycée quand le prof, au lieu de faire cours renvoie ses élèves sur la vidéo youtube d’un collègue ?

Pourquoi, dès lors, passer des heures en classe, alors qu’il suffit de 5 minutes dans son lit pour regarder la vidéo ?

Quel sens, métaphysique, peut avoir notre vie, celle de l’atome que nous sommes ?

Un absolu qui dénie la réalité

Oui, Aurélie a raison. Raison dans l’absolu. Raison en théorie.

Je ne sais pas s’il est possible de répondre au sens de la vie en général.

Je sais qu’il est possible de répondre au sens de notre vie, la nôtre, la vôtre, celle de chacun d’entre nous.

C’est ça que doit trouver Aurélie.

Etre en phase avec soi-même

Aurélie cherche en fait à être elle-même, à savoir qui elle est et comment faire à sa façon.

Il est bien évident qu’assister à une journée de cours quand vous pouvez faire l’équivalent en 1h chez vous n’a que peu de sens. Pour elle. Pour d’autres ce serait plus complexe de tout faire de chez eux.

Un besoin de souffler

Nombre des ados que j’accompagnais avant la crise sanitaire éprouvaient ce besoin de souffler, de faire cesser cette routine métro-boulot-dodo qui les épuise et brise leurs ailes.

Le confinement leur a fourni cette opportunité de respire sans culpabiliser, de ne pas être à l’école en en ayant le droit, de travailler à leur rythme et à leur façon, sans pour autant décrocher.

Des résultats au rendez-vous

Car leurs résultats sont là, peut-être pas parfaits mais les positionnant en général dans le premier tiers de leur classe.

Certes ils n’ont que peu ouverts leurs livres et leurs cahiers pendant le confinement, mais en quoi est-ce un problème puisqu’ils réussissent leurs évaluations ?

Ce qu’ils demandent

Prenant un chemin souvent différent de celui de leurs amis, ils demandent qu’on les laisse faire à leur façon, lorsque le résultat est là, qu’on ne les oblige pas à fonctionner à l’envers d’eux-mêmes.

Ils revendiquent le droit à être eux-mêmes

Car nos ados savent qui ils sont. Ils assument leur personnalité et leur singularité.

Quand la génération 80 chantait l’amour, leurs idoles chantent l’assumation de soi. C’est la marque de fabrique des ados covid

Merci Covid

La pause imposée par le covid dans leur vie, dans leur emploi du temps leur permet d’imposer leur personnalité. Faisant cesser leurs activités, ils ne conservent que celles qui leur correspondent.

Jamais désœuvrés

Même à l’heure où tout est à l’arrêt, ils savent s’occuper, souvent plus que les adultes que nous sommes. Se lançant dans l’apprentissage du Japonais pour Aurélie, du dessin de manga et de l’art du cosplay… qu’elle partage avec ses amis.

Toujours avec leur portable

Ce n’est pas parce qu’il est toujours dans leur main qu’ils ne savent pas jauger l’utilisation qu’ils en font. Tutos pour leurs activités, montages vidéos à partager, applis pour apprendre… tout passe par le téléphone. Oui, mais pour la bonne cause.

Et le moral ?

Plutôt bon.

« On sait que tout ça se terminera un jour. Et, même si on apprend à vivre avec le covid, il ne nous empêche pas de courir dans la neige avec les chiens. »

Alors, faisons confiance à nos ados. Le monde est entre de bonnes mains.

Béatrice Millêtre